On pourrait passer des heures à évoquer son travail, dans lequel on sentait à chaque nouvelle publication, à chaque nouvelle note de blog, une étape franchie dans ce processus sans fin qu’est la recherche de son propre langage, l’assurance de sa propre pratique, la longue quête vers l’accomplissement de sa création.
On pourrait aussi évoquer les finalement rares occasion de travailler avec elle qui nous ont toujours ravis, et emballés, que cela soit la création de sa version de la boîte Distroboto des copains de La Fanzino, ou les compositions pour des affiches d’événements organisés par plusieurs chifoumistes.
On pourrait également expliquer combien on a été fiers d’accompagner un peu, à notre manière, cette évolution lors des trois éditions de Pierre Feuille Ciseaux, en voyant une jeune étudiante timide inscrite à un workshop en 2009 finir par assumer tant bien que mal sa présence en tant qu’auteure, trois ans plus tard, au sein du groupe d’artistes invités en résidence (lors de Pierre Feuille Ciseaux #3, l’an passé), à se laisser porter par l’émulation générée par ses confrères, dont certains devinrent au passage de très solides amis.
On avait d’abord pris l’habitude de la côtoyer (timidement), et petit à petit elle était naturellement devenue un vrai morceau de la troupe de ChiFouMi, présente à chaque réunion, à chaque rendez-vous organisé par l’asso, donnant des coups de main systématiquement, et assénant au passage de nombreuses déclarations enthousiastes pour tel artiste marquant, pour telle nouvelle parution, pour tel rendez-vous à venir : de l’enthousiasme pour cette bande dessinée qui nous stimule tant, cela faisait plaisir à voir et à entendre.
Il y a une quinzaine de jours, elle était venue au Gymnase – espace culturel de Besançon pour aider à l’installation de notre nouvelle exposition ; celles et ceux qui y fouleront du pied les boutons de démarrage du Petit Théâtre de L’ébriété (l’exposition interactive de Ruppert & Mulot) pourront penser à elle, qui a passé la journée à quatre pattes à scotcher au sol tous ces boutons-pressoirs sur un revêtement de sol récalcitrant.
On était contents de tout ça, car on avait l’outrecuidance de penser qu’il ne s’agissait là que d’un début, que tout ça finirait par éclore ouvertement, que tout le monde le remarquerait : Marie-Florentine avait ce talent, cette empreinte d’identité graphique qui en impose au premier regard, et dont on avait l’impression d’assister lentement mais sûrement à la belle éclosion. Elle était drôle, elle savait dire à chaque soirée des conneries plus grosses qu’elle, malgré tout sans jamais abandonner son spleen existentiel qui la suivait comme un petit toutou, et dont on aurait évidemment volontiers préférer se passer, même si on savait bien que c’était là quelque chose qui faisait partie de ses stimuli les plus efficaces, paradoxalement.
Les deux ont décidé de nous laisser sur place, seuls, avec seulement quelques très beaux dessins et nos souvenirs ; et c’est tout. C’est bien trop peu et c’est bien trop tôt.
Nous adressons notre plus vif soutien à sa famille, à ses proches, à ses amis, à qui l’on pense fort.
Et nous n’oublierons jamais Marie-Flo.
Ce Qui Nous Lie lui est évidemment dédié.
June, pour l’association ChiFouMi.